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Test – Forza Motorsport, un diamant brut

Voilà six ans que le dernier épisode de Forza Motorsport est sorti. Une période d’absence inédite pour la licence qui s’explique par bien des raisons et notamment le souhait de Turn 10 de se réinventer. Le studio à l’origine de la simulation de course n’a en effet jamais caché ses ambitions de revenir aux sources, à l’essence même de sa création et de reposer les bases de ce qu’est la course automobile sur console et PC. De quoi faire grimper l’excitation des passionnés d’automobiles et autres Sim racers … et laisser sur le bord de la route les joueurs plus occasionnels ?

Repenser la course auto

Ce n’est pas une insulte que de dire que Forza Horizon est devenue la licence phare de Xbox. Depuis une dizaine d’années, ce qui était à l’origine un spin off de Forza Motorsport, s’est imposé comme la véritable star de la famille. Plus grand public, plus fun, plus tape à l’œil, Horizon est un titre plus universel que son aîné et, fort logiquement, attire plus de monde que la simulation sportive. Au grand désarroi de Turn 10 ? Probablement pas. Car à dire vrai, le studio de Redmond y a sans doute vu une opportunité unique pour se recentrer sur ce qui fait son ADN: le sport automobile. Fini les limousines, fini les véhicules atypiques, il était grand temps pour Motorsport de redevenir une licence pour les pilotes.

Il suffit de quelques minutes pour qu’un sourire se dessine sur mon visage. Dès son intro, Forza Motorsport nous propulse du côté de Mapple Valley et Hakone (Japon) au volant des Corvette E-Ray et Cadillac V-Series.R. Une séquence de quelques tours seulement, histoire de nous immerger dans l’ambiance de la compétition mais qui permet déjà de voir les progrès immenses de Turn 10 en matière de pilotage. Fondamentalement, Motorsport reste une simulation grand public, accessible. Mais manette en main, avec les bons réglages, ce nouvel opus est un plaisir sans équivalent à l’heure actuelle. Et si la conduite est avant tout une question de physique, entre transfert de masse et perte d’adhérence, elle est ici aussi une question d’instinct.

En effet, les développeurs n’ont pas seulement peaufiné leur approche de la conduite, ils ont entièrement revu leur copie. Le but ? Nous offrir des bolides qui vivent jusqu’au creux de nos mains. Chaque véhicule se comporte différemment et il est aisé de le ressentir en piste. Qu’il s’agisse du mordant du freinage, de la stabilité de la caisse ou encore de la motricité, les écarts entre véhicules sont clairement marqués. Ainsi, n’espérez pas attaquez vos virages pleine balle avec une Cayman GTS, au risque de partir tout droit et de finir dans la rambarde de sécurité. Cependant, avec d’autres modèles, les erreurs peuvent se payer moins cher et la sortie de route être évitée. Car dans ce Motorsport nouveau, le plus léger des sous virement ou le moindre patinage se propage instantanément au joueur.

et laisser parler l’instinct

C’est véritablement la grande force de ce nouvel opus en matière de conduite. Le lien qui unit le joueur à son bolide est quasi tangible. Quelle que soit le comportement de ce dernier, il nous apparaît clairement ce qui nous offre des fenêtres de réaction inattendues lorsque le contrôle est sur le point d’être perdu. Dès que votre véhicule part à la dérive, vous pouvez reprendre la main. Bien sûr, la réussite de vos manœuvres dépend de votre capacité à agir rapidement et précisément mais cet aspect offre des sensations et opportunités inédites pour la licence. Une poussette d’un concurrent ou des gaz remis trop tôt ne seront plus nécessairement synonymes de sortie de piste. Résultat, nos temps en courses sont l’absolu reflet de nos talents de pilotage. Et si les erreurs se payent cash, aucune frustration n’intervient grâce à une physique qui se veut plus que jamais cohérente.

Cette physique n’est d’ailleurs pas la seule réjouissance que propose ce reboot. Car si un sourire étirait mes lèvres dès les premières courses, c’est aussi parce que j’en prenais plein les yeux. Turn 10 connait particulièrement bien les entrailles des Xbox Series pour avoir été partie prenante lors de leur conception. Les ingénieurs ont en effet travaillé pour mettre au point le hardware des deux consoles et le studio maîtrise donc leur caracteristiques. Et le résultat à l’écran enchante.

Naturellement, Motorsport propose sa dose de Car Porn. N’importe quel amateur de bagnole pourra admirer les lignes des véhicules, en course ou dans son garage. Chacun d’entre eux bénéficie du même soin, qu’il s’agisse d’une sportive compact ou d’une hypercar à plusieurs millions d’euros. Que vous choisissiez la vue cockpit ou une caméra extérieure, les courbes des Ferrari, Porsche et autre Lamborghini sont un absolu plaisir. Mais plus encore que les voitures, ce sont les décors et effets visuels qui régalent.

Le show dans le show

Si Horizon 5 a ses forêts luxuriante et sa mangrove pour impressionner, Motorsport peut en effet compter sur sa météo pour subjuguer. Au point que j’espérais ne pas rouler en plein soleil à chaque course qui s’annonçait. Brume, brouillard, pluie légère ou diluvienne, coucher de soleil, aube, pleine nuit… chaque condition fait vivre une expérience unique qui témoigne de la maîtrise technique de Turn 10. L’humidité du brouillard joue ainsi sans mal avec les rayons du soleil pour nous aveugler. La pluie, dynamique en course, crée de plus en plus de flaques où se reflètent les lumières et éléments du décors. L’aube ou l’aurore offrent des teintes orangées, chaudes, qui illuminent un ciel déjà particulièrement réaliste. Le spectacle est tant sur la piste que tout autour de cette dernière.

A la lecture des circuits proposés dans ce Motorsport, je confesse avoir été fébrile. Et si je pense toujours qu’une vingtaine de destinations est un nombre plutôt léger pour un lancement, je dois reconnaître qu’une vaste majorité m’a largement séduit grâce au soin apporté à leur réalisation. Les tribunes proposent du public, des hélicoptères et avions parcourent le ciel, des confettis explosent à proximité de la piste. Turn 10 a vraiment fait de l’excellent boulot. Mention spéciale à Mapple Valley et ses innombrables arbres aux couleurs automnales qui s’avère être délice visuel. Hakone n’est pas en reste avec ses cerisiers blancs, les lumières qui se reflètent sur les carrosseries ou cette vue inattendue sur le Mont Fuji. Un régal.

Et la cerise sur ce gâteau déjà bien riche n’est autre que le raytracing. Disponible parmi les trois modes de jeu proposés, ce dernier se joue en 60 images par seconde et résolution dynamique et apporte un supplément à l’immersion globale à mon sens. Voir le reflet de notre voiture sur les portières de notre concurrente, apercevoir notre calandre sur le haillon d’un adversaire prêt à être croqué : le rendu global est absolument superbe et je pardonne sans mal ces quelques gouttes de pluies encore trop timides sur le pare-brise de ma GT. Motorsport n’est pas une claque graphique mais brille par cette cohérence et cette vraisemblance qui se dégage de tous les éléments qui le compose.

Pas de quoi gonfler son CV

Des visuels impressionnant, un sens du pilotage exemplaire : je pourrais sans doute m’arrêter ici et sabrer le champagne. Forza Motorsport est de retour, le roi reprend sa couronne, merci, bon jeu et à bientôt. Mais un jeu de course ne s’arrête pas aux sensations qu’il offre en piste. Et il s’avère que lorsque Turn 10 parlait de reboot, il ne parlait pas que du pilotage. Il semble en effet qu’il parlait de philosophie.

Pendant longtemps, j’ai espéré que Forza Motorsport nous offre une carrière digne de ce nom. Un mode qui nous laisse commencer en bas de l’échelle avant de gravir un à un les échelons vers la gloire. Se débattre dans des catégories réservées aux vieilles sportives, aux compactes pas toujours impressionnantes pour se faire remarquer et monter de catégorie. Observer nos adversaires, identifier nos rivaux, celles et ceux qui nous forcent à nous dépasser pour aller chercher toujours mieux. En un mot, nous offrir un mode scénarisé qui permettrait de stimuler et faire vivre le sentiment de compétition en nous.

Il n’en est rien.

Certes, la carrière de Forza Motorsport a cela de réussie qu’elle nous offre rapidement une belle diversité d’épreuves et de catégories. Qu’elle nous laisse le temps de nous habituer à un véhicule pendant des championnats de cinq, six courses et de l’améliorer au fil de nos victoires. Mais pour ce qui est de l’incitation à jouer : Rien. Que dalle, nada. Walou.

Bis repetita

Comment mentionné, chaque championnat offre une poignée de courses pendant lesquelles vous affronterez 23 adversaires. Une session d’essai est imposée avant chaque départ et vous indique le temps cible à réaliser pour espérer finir dans le premier tiers du peloton. De quoi prendre ses marques sur les circuits avant de se lancer dans le grand bain. Vous enchaînez ainsi les épreuves, alternant entre essais et course jusqu’à la fin du championnat. Une fois celui-ci terminé ? Vous passez au suivant. Peu importe que vous soyez premier ou dernier, que vous ayez explosez votre véhicule ou conduit parfaitement, que vous ayez fait des remontadas insensées depuis la P24 pour atteindre le podium. Vous passez simplement au championnat suivant, sans aucune sorte de récompense.

Alors bien sûr vous gagnez plus ou moins d’argent en fonction de votre classement. Mais n’espérez rien de plus. Pas de niveau de notoriété, pas de système d’écuries, pas de sponsors pour gagner plus d’argent, pas d’invitations à des événements hors championnats. Dans Forza Motorsport, votre seul objectif est de rouler et de vous battre, pas tant contre les autres finalement, mais contre vous-même. Puis de recommencer avec une nouvelle voiture et dans une nouvelle catégorie.

Au rayon des bonnes nouvelles, je me dois de souligner l’introduction des points de voiture. Accumulés à chaque course, ceux-ci viennent récompenser les dépassements, les trajectoires idéales, les segments sans pénalité et autres conduite propre. Au plus vous performez, au plus vous gagnez… et au plus vous pouvez dépenser ! Car ces points, loin d’être anecdotiques, permettent d’améliorer votre véhicule.

Le stand fantôme

Changement de gomme, suspension, moteur, freins… vous pouvez quasiment tout améliorer et tout configurer. Une fois les nouveaux équipements achetés, vous avez en effet le loisir de venir régler votre véhicule dans les moindres détails via une interface richement détaillée. De la longueur des rapports au pourcentage d’antigéométrie en passant la rigidité du rebond ou la garde au sol, tout est accessible du moment que vous avez acheté le matériel adéquat. Les passionnés adoreront tandis que les néophytes profiteront de l’option « automatique » pour des achats et réglages gérés par l’IA.

Notez que les pneus et le carburant font l’objet d’un menu dédié et que vous pourrez là aussi faire des choix avant chaque course. Le choix de la gomme se fera en fonction de la météo ou du nombre de tours tandis et l’essence impactera nécessairement votre stratégie de course. Un réglage pas toujours intelligemment pensé d’ailleurs puisque le niveau de carburant sera systématiquement et largement supérieur à votre besoin réel en course. Que vous ayez 4 ou 6 tours à faire, vous embarquerez par défaut de quoi en faire 12 ou 16. Un détour s’impose donc avant chaque course au risque de faire chuter vos chronos. Pénible.

Autre nouveauté pour les menus : les arrêts au stand. Désormais, vous aurez la possibilité de changer vos pneumatiques lors des courses, de remettre du carburant, voire de réparer des dégâts plus ou moins importants. Cependant, Turn 10 assure ici le service minimum. Aucune équipe n’est presente dans les stands en dehors de la vôtre et cette dernière n’est jamais visible en action. Dès lors que vous franchissez la ligne des stands, le contrôle du véhicule et de la caméra vous est retiré pour vous laissez uniquement choisir les actions à effectuer. Suit une cinématique de quelques secondes à peine avant de vous remettre aux commandes en sortie des stand. Un ajout pour le moins anecdotique sur la forme qui aura néanmoins des impacts lourds lors des courses d’endurance, et notamment avec vos amis.

Quelques inconnues

Difficile de donner pour l’heure un avis définitif sur le contenu disponible en ligne. Lors des sessions de test, je n’ai pu croiser que trois âmes en lignes pour un total de trois courses dont la dernière s’est soldée par une déconnexion et redémarrage de ma console. Toujours est-il que l’ensemble paraît intuitif et plutôt bien pensé même si, là aussi, j’aurais aimé plus de mode de jeux. Un mode course libre, un autre réservé pour les championnats et enfin un mode rival. Ce dernier est toutefois particulièrement pertinent puisqu’il permet d’affronter les fantômes de nos amis mais également des meilleurs pilotes en Europe ou dans le monde. Idéal pour découvrir les trajectoires des plus rapides et améliorer son skill en temps réel.

Du côté de la configuration des championnats multi, là aussi tout semble complet. La classe, les conditions météo, les restrictions, la durée, les arrêts au stands : à peu près tout est paramétrables et peut être sauvegardé pour être rejoué facilement. Cependant, le plus important reste à juger : la stabilité des serveurs, la pertinence du matchmaking et l’application des règles de courses.

Cette dernière sévissait déjà sur la partie solo, non sans quelques pénalités attribuées parfois de manière hasardeuse. Quelques dixièmes de secondes appliquées pour des contacts sans conséquence, plus rarement des secondes pour du hors piste qui m’a fait perdre du temps et parfois aucune pénalité alors que mon concurrent finissait dans le décor… A l’échelle de mon expérience globale, les dysfonctionnements paraissent peu nombreux, mais il faut s’assurer qu’ils ne se multiplient pas au fur et à mesure du temps et que Turn 10 veille au grain.

Seul avec moi-même

Même topo concernant l’IA qui se repose sur du machine learning. Comprenez par là qu’elle est « auto-apprenante » et qu’elle est censée se peaufiner, s’améliorer au fur et à mesure du temps. En l’état, sans parler de déception, elle ressemble surtout furieusement à celle des précédentes itérations de la saga. Trois ou quatre adversaires se montrent coriaces en tête de file tandis que le reste du peloton se dévore facilement sauf lorsqu’il décide de vous barrer la route. Des comportements pas toujours logiques, comme des freinages en sortie de virage ou en légère courbe, viennent également entacher la course, vous attribuant au passage des pénalités qui vous paraitront bien injustifiées. Là encore tout cela n’est pas représentatif de l’expérience d’ensemble mais s’est produit à plusieurs reprises. Suffisamment en tout cas pour me couter un championnat !

Pour terminer, il me faut absolument et impérativement saluer le travail des ingé son. Après quelques réglages dans les options pour mieux entendre ma voiture que celle du voisin, j’ai tout simplement adoré le sound design de ce Motorsport. Les bruits moteurs, les crissements des pneus, les réverb lorsqu’on passe sous un élément du décor : tout est absolument fait pour offrir une immersion la plus efficace possible et bercer nos oreilles du grondement de tonnerre divin des V8 atmos, et pas que !

Et heureusement ai-je envie de dire. Car à l’heure de tourner encore et encore sur la piste je me suis senti parfois bien seul. Pas d’équipe pour m’indiquer ma position, mes temps, les écarts avec les autres pilotes. Seule une voix féminine me rappelle à l’entrée du dernier tour que, ça y est, il ne reste plus qu’un tour. Alors, chère inconnue, merci à toi, heureusement que tu es là pour me le rappeler. Et souligner, après une course où j’ai visiblement mangé quelques murs et effectué deux sorties de pistes que ma P3 est “nette et sans bavure”. Voilà qui est particulièrement à propos…

Un diamant nommé Forza

Alors, que retenir de cette renaissance de Forza Motorsport ? Sur le plan technique, il s’agit incontestablement d’une formidable réussite qui marie une esthétique irréprochable à un gameplay abouti et exaltant. Et qui, grâce à ses nombreuses options et réglages, s’adresse à tous les profils de pilotes virtuels. Sur le plan ludique, le constat est plus nuancé. Si vous êtes du genre à ne vivre que pour ce dixième, ce centième de seconde qui vous permet de signer un meilleur chrono que votre plus grand rival, alors le titre est fait pour vous. Si à l’inverse vous souhaitez vivre un parcours de champion et ressentir avant tout l’attrait de la compétition, il est probable que le mode carrière vous tombe des mains avant même d’arriver à la moitié de sa proposition.

Forza Motorsport s’impose comme un titre d’excellence que bien des pilotes adoreront. Mais en signant un reboot centré sur la course, il a peut-être perdu de vue l’aspect compétition qui servait d’attrait à un public plus large dont je fais clairement partie. Le coeur de ce Forza est excellent. Reste désormais à tailler le diamant pour qu’il brille davantage aux yeux de tous. Espérons que ce soit l’avenir que lui réservent ses développeurs.

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