Oakmont, surnommée la Venise américaine et située en bordure immédiate de l’océan, recherche détective un peu fêlé pour enquêter sur des disparitions d’être humains (ou presque). Au passage, il faudra aussi éliminer ces monstres à tendance tentaculaire. Devant une telle annonce, vous, Charles Reed, détective de votre état ne pouviez pas faire autrement que de vous ruer sur place. Et ce ne sont pas les hallucinations dont vous êtes victimes qui vont vous arrêter, n’est ce pas ?
Et vous, vous allez où pour les vacances ?
Vous l’aurez compris, The Sinking City fait la part belle aux monstres et hallucinations. Ça tombe plutôt bien, le jeu ne cachant pas ses inspirations venant directement d’un certain H.P. Lovecraft. Petit rappel au cas où le monsieur vous soit inconnu. Auteur du début du XXème siècle, Lovecraft est essentiellement connu pour ses récits fantastiques à tendance horrifique. Un de ses thèmes favoris porte sur la faiblesse de l’esprit humain face à ce qu’il ne comprend pas. Il l’exprime en particulier dans ce que l’on appelle aujourd’hui “le Mythe de Chtulhu”. Dans celui-ci une entité extraterrestre à tête de pieuvre cherche à rétablir sa domination sur le globe via la domination spirituelle des humains. La déformation de la réalité et la peur de l’inconnu sont donc au cœur de l’oeuvre de l’auteur. Et on les retrouve bien évidemment dans le jeu.
The Sinking City est donc un jeu horrifique, c’est à dire qu’il fait peur ? Et bien oui et non. Ne vous attendez pas à des jumpscares à chaque coin de rue. Conformément à l’oeuvre de Lovecraft, la peur passera plus par des phénomènes dérangeants ou inexplicables. En particulier, les personnages que vous rencontrerez ont des traits de visage plus ou moins humains. Ne vous étonnez donc pas lorsque vous croiserez votre premier homme poisson.
De même, les différentes hallucinations sont là pour vous mettre mal à l’aise, et non pas pour vous faire sursauter. La ville en elle-même est dérangeante, avec ses bâtiments délabrés ou criblés de coquillages, ces tas de tentacules jonchant le sol ou encore ses effets météo oppressants. J’ai en tout cas trouvé cette ambiance très réussie, originale et dérangeante. D’ailleurs, si le scénario n’est pas incroyable, il présente lui aussi son lot de mystères suffisamment intrigants pour avoir envie d’en voir le bout.
Touché !
Il y a par contre un point où le jeu ne respecte pas particulièrement son matériau de base : la représentation des monstres. Comme déjà dit, pour Lovecraft, la peur passe essentiellement par l’inconnu. Or, dans le jeu, les combats sont fréquents, et les monstres bien visibles. Leur IA étant par ailleurs complètement ratée, autant dire que la peur est totalement absente à ce niveau. Rajoutez à cela un gameplay en combat pas vraiment agréable et des boss plutôt pénibles, et vous comprendrez que cette partie du jeu n’est pas une franche réussite. Et ce n’est pas l’ajout d’une barre de santé mentale en plus de la classique barre de vie qui change vraiment la donne, malgré une idée de base louable. On se demande alors pourquoi Frogwares a voulu absolument nous montrer les monstres plutôt que d’en rester à une représentation suggérée qui aurait plus collée à l’ambiance du jeu…
Le jeu présente également, comme beaucoup (trop) de jeux de nos jours, un aspect RPG. Gains d’expérience et de niveaux sont donc au programme. Ainsi, chaque niveau gagné vous permet de débloquer quelques bonus dans 3 arbres de talent, comme la possibilité de porter plus d’objets (munitions, pièges, matériaux de craft, …), de faire durer vos pièges plus longtemps ou encore d’augmenter votre vie. Du classique, mais qui s’avère au final très accessoire et ne présente pas réellement d’intérêt.
Coulé ?
Graphiquement, le jeu est plutôt correct, en partie grâce à une direction artistique réussie. Les bâtiments, les différents effets (brume, pluie, jour/nuit, …) rendent bien, et les personnages sont crédibles dans leur irréalisme. Par contre, cela se complique dès que l’on aborde la partie technique. Testé sur Xbox One X, le jeu est censé tourner à 60fps. “Censé” étant le mot important, tant les chutes de framerate sont nombreuses, et le tearing et le clipping omniprésents. Dans le même ordre d’idée, le jeu est truffé de bugs en tout genre, particulièrement concernant les PNJ peuplant la ville. Ceux-ci ont en effet beaucoup de mal à trouver leur chemin, passent à travers le décor, glissent parfois sur le sol et j’en passe. C’est d’autant plus dommage que certains de ces bugs ont une forte tendance à casser l’immersion, qui est pourtant un des aspects du jeu les plus réussis.
De plus, pour rester sur l’open world, sa taille, le peu d’options de fast travel et les nombreux allers-retours induits par les enquêtes peuvent avoir tendance à casser le rythme. On sent d’ailleurs un peu de remplissage à ce niveau, avec des zones infestées de monstres placées sur la map sans cohérence, et séparées du reste de la ville par une simple estrade en bois d’un mètre de haut. On repassera pour la crédibilité.
La partie immergée de l’iceberg
Alors on jette à la benne sans aller plus loin et on passe à autre chose ? Et bien pas vraiment.
Si vous avez suivi un peu la production du studio, vous savez que Frogwares est à l’origine de tous les derniers Sherlock Holmes. Des jeux d’enquête présentant certes leur lot de défauts, mais qui n’ont fait que s’améliorer au fil des épisodes. La formule est donc aujourd’hui parfaitement huilée, et on la retrouve pratiquement à l’identique ici. Avec une (grosse) subtilité toutefois : la ville est entièrement accessible à tout instant. Cela permet donc de nouvelles mécaniques de gameplay intéressantes.
Déjà, il est possible de travailler sur plusieurs enquêtes en parallèle. Mais surtout, il faudra parfois déduire par vous même dans quelle zone concentrer vos recherches, sur la base des indices dont vous disposez. Bon, pas besoin d’avoir vu tous les épisodes de Columbo pour trouver votre prochaine étape, les indications sont généralement plutôt claires. Mais quand même, c’est toujours sympa de sortir votre carte pour chercher où les indications vous mènent. Surtout que, lors de vos pérégrinations, vous pourrez parfois tomber sur des quêtes secondaires. Peu nombreuses, elles ont le mérite d’avoir un réel intérêt pour approfondir le lore autour du jeu.
Sherlock Holmes à la rescousse
Concernant les enquêtes à proprement parler, celles-ci reposent globalement toutes sur le même principe. Vous commencerez par vous rendre sur le lieu de l’enquête, où vous récupérerez différents indices, soit visibles directement soit via l’utilisation d’un pouvoir visuel. Une fois suffisamment d’indices récoltés, vous devrez alors reconstituer la scène en replaçant les événements survenus dans l’ordre. Cela vous permettra par exemple de découvrir une pièce cachée amenant à plus d’indices ou simplement de faire avancer l’enquête. Certains indices sont notés dans votre carnet, et en les associant entre eux, cela vous amènera petit à petit à une conclusion.
Des PNJ viennent régulièrement briser la routine, avec leur lot de dialogues apportant des informations utiles (ou non) à votre enquête. Les dialogues et leur doublage (en français) sont dans l’ensemble très corrects, avec des personnages qui chercheront parfois à influencer vos décisions selon leur vision.
Car je n’en ai pas encore parlé, mais il peut arriver que vous soyez amener à effectuer un choix moral au cours d’une enquête, comme la possibilité de dénoncer ou non un criminel. Si vos choix ont peu d’impact à long terme, certaines décisions sont assez drastiques. Tout n’est pas blanc ou noir dans le monde de The Sinking City !
Si cela peut paraître répétitif, j’ai trouvé cet aspect suffisamment proche de ce que j’attends d’une enquête pour ne pas vraiment le ressentir. Surtout qu’en plus des PNJ, d’autres éléments viennent enrichir les possibilités. Vous devrez par exemple, après avoir récupéré le nom d’un bateau, vous rendre au journal du coin pour aller recouper ces informations avec les archives. Cela vous permettra alors d’en déduire la localisation de la zone d’enquête suivante. Bref, si tout n’est pas rose, le coeur du jeu reste de très bonne facture.
Le Titanic des jeux vidéo : tout y est, mais ça prend un peu l’eau
Au moment de la conclusion, que faut-il retenir de ce jeu du coup ? Et bien que nous sommes face à un jeu AA qui a probablement trop voulu jouer dans la cour des AAA. Si on sent bien la volonté du studio, on est malheureusement souvent amené à constater que le jeu est trop ambitieux pour son bien. Un monde ouvert, c’est bien, surtout quand cela influe directement sur le gameplay. Mais techniquement le jeu présente beaucoup trop de tares. De même, l’aspect RPG était-il nécessaire ? Et le craft ? Voire carrément toute la partie combat ? A trop vouloir en faire, le jeu manque cruellement de finition sur certains aspects. Et c’est fort dommage. A vous de voir si ces défauts sont rédhibitoires, ou si vous êtes prêts à passer outre pour profiter de ce que le jeu a de meilleur. Personnellement j’attends un patch, mais j’aimerais bien finir le jeu !
Critères d’accessibilité
Déficience Visuelle | Déficience Auditive | |
✘ Contraste élevé (réticule de visée) | ✘ Sous-titres avec indications d’ambiance | |
✘ Taille couleur de police | ✘ Identification de la personne qui parle | |
✘ Marquage des ennemis | ✘ Police personnalisable | |
✘ Interface personnalisable | ✘ Couleur de police personnalisable | |
✘ Couleur minicarte personnalisable | ✘ Options d’alerte alternatives (vibration, flash…) | |
✘ Option daltonisme | ✘ Sons ambiants signalés (informe sur présence) | |
✘ Option Text to speech | ||
✘ Ralentissement du jeu |
Conditions de test
s TV | 4K HDR | Jeu fourni par l’éditeur | Oui | |
Console | Xbox One X | Temps passé sur le jeu | 15 heures | |
Niveau de difficulté | Détective pour la partie Enquête, normale puis facile pour les combats | Jeu terminé | Pas encore |