Encore un jeu français ! Développé par Rundisc, studio toulousain de moins de 10 employés, Chants of Sennaar se présente sous la forme d’un jeu de puzzles – aventure. Mais pas la version classique du genre. Ici une grande partie du jeu portera sur l’apprentissage et la compréhension de langues inconnues. Mais un jeu réalisé par si peu de monde est forcément moyen non ? Ou alors est-ce que je vais dire que c’est bien uniquement car c’est français ? La réponse est non dans les 2 cas. Rentrons dans le détail de pourquoi Chants of Sennaar est une nouvelle petite pépite.
Tunic et Return of the Obra Dinn sont sur un bateau. Personne ne tombe à l’eau.
Je ne sais pas si les développeurs ont été influencés par les jeux ci-dessus, mais j’y ai retrouvé certaines similitudes. Et ce n’est évidemment pas négatif, loin de là. Tout comme pour Tunic, vous arrivez dans un monde où tout vous est inconnu. Ce que vous faites là, ce que vous devez faire, comment interpréter les signes qui vous entourent. Et, dans une certaine mesure, toute la notion de traduction. Celle-ci est présentée différemment ici, et il n’y a pas de carte ou de mécaniques de gameplay à découvrir. Mais l’essentiel du jeu repose sur la découverte de mots, leur traduction, et leur compréhension. Et c’est là où on retrouve un peu d’Obra Dinn.
Au fil du jeu, vous allez rencontrer de nombreux personnages. Ceux-ci auront presque toujours quelque chose à dire. De même, de nombreux mots se retrouveront écrits sur des panneaux ou autres objets du décor. Le jeu se chargera alors de tous les noter automatiquement dans votre petit carnet. C’est ensuite à vous d’être suffisamment observateur pour trouver leur signification. Via les gestes des pnj, le lieu où ils se trouvent, les objets qui les entourent, la répétition de certains termes dans des situations différentes, on finit toujours par leur trouver un sens. Pas forcément le bon cela dit, et il m’est parfois arrivé de viser pas mal à côté. Mais c’est un des aspects très appréciables : vous êtes libres de noter n’importe quelle traduction pour les mots que vous pensez avoir percé à jour. Ceux-ci sont ensuite automatiquement remplacés par votre interprétation lorsque vous les retrouverez.
Heureusement, il est possible régulièrement de valider des grappes de mots (généralement 3 ou 4) en les associant avec l’image qui leur correspond. Et oui, à ce stade vous avez probablement compris en quoi ces différentes mécaniques m’ont rappelé Obra Dinn, puisqu’elles sont très proches.
Tout cela fonctionne donc particulièrement bien, et est, à mon sens, bien équilibré. On ne reste jamais trop longtemps perdu, la quantité de mots validés ou en cours de validation reste toujours acceptable. Et pour autant, on est régulièrement dans le flou de savoir si on a bien compris. Avec l’inévitable “mais bien sûr !!” lorsqu’une solution pourtant évidente nous a échappé trop longtemps.
Bryan is in the kitchen
Mais ce n’est pas tout ce que propose Chants of Sennaar. Déjà, il y a plusieurs chapitres dans le jeu, avec chacun sa langue. On repart donc régulièrement de zéro, mais le jeu a la bonne idée de proposer des approches différentes dans l’apprentissage, ce qui évite la redondance. Qui plus est, chaque langue a ses propres règles de “grammaire”, qu’il faut aussi comprendre. Et une fois que vous pensez maîtriser tous les aspects sur le bout des doigts, il y a même quelques phases de traduction entre 2 langues. Pendant celles-ci, il faut arriver à faire le lien entre le vocabulaire utilisé dans chacune (car les différents peuples n’ont pas forcément les mêmes noms pour tout) et en plus utiliser correctement la grammaire. Un joli casse-tête par moment, et qui a le bon goût d’être facultatif. Et qui ne devrait ainsi frustrer personne. Toute cette partie d’investigation du langage m’a en tout cas plutôt fasciné, et j’ai adoré découvrir petit à petit la vision de chaque peuple.
Et tout cela n’est pas là juste pour la beauté du geste. Toutes ces connaissances durement acquises permettent de résoudre des puzzles. A quelques exceptions près (dont un puzzle impliquant des poids en toute fin de jeu, qui m’aurait bien creusé les méninges), ceux-ci sont plutôt simples. Il s’agit encore une fois d’être bien attentifs, de traduire des indices, puis d’appliquer la solution. Ainsi, par exemple, un puzzle de début de jeu consiste à récupérer des fragments de texte, fragments qui nous indiqueront comment positionner des statues entre elles afin d’ouvrir un passage secret. Une énigme classique donc, mais l’ajout de la composante “compréhension” des textes lui ajoute une toute autre dimension. Le jeu étant plutôt court (8-9h de mon côté pour le terminer à 100%), les énigmes ont la bonne idée de toujours se renouveler, avec souvent une thématique en fonction de la région. Ainsi même si certaines mécaniques peuvent paraître un peu en dessous (je pense en particulier à des segments d’infiltration), c’est suffisamment court pour qu’on ne puisse en tenir rigueur au jeu. Bref, là encore une réussite.
Pause technique
Techniquement le jeu est très solide. Je n’ai noté ni bug, ni crash et un framerate parfaitement stable. L’esthétique du jeu a un petit côté Monument Valley, avec ses lignes épurées. Le jeu reste ainsi toujours parfaitement lisible, tout en gardant une identité propre pour chacune de ses zones. On adhère ou non, mais cette direction artistique a le mérite de remplir pleinement son office et de ne jamais entraver la progression. Et pour une si petite équipe, le choix me parait particulièrement pertinent. Enfin, pour ne pas spoiler, et car le jeu se savoure d’autant plus en le découvrant à son rythme, je n’ai pas du tout abordé l’aspect scénaristique. Mais là encore le tout, sans être renversant, est parfaitement imbriqué avec le reste du jeu et sert son propos.
Wunderbar !
Au moment de conclure, Chants of Sennaar est pour moi un des jeux indépendants de l’année, tout simplement. Sans réelle fausse note et avec une imbrication intelligente de ses différentes mécaniques, j’ai énormément apprécié découvrir son univers, et me gratter la tête pour résoudre les énigmes qu’il renferme. Le tout sans jamais me lasser grâce à une belle variété de situations. Et petite réflexion personnelle pour conclure mais à nouveau je me dois toutefois de faire un constat. Un jeu “court” mais parfaitement équilibré est tellement plus agréable qu’un jeu tout aussi réussi dans ses mécaniques, mais qui s’impose de s’étirer en longueur, jusqu’à l’écœurement, pour justifier un statut ou un prix de vente. En tout cas, une fois de plus, la France du jeu vidéo nous montre qu’elle dispose d’un incroyable talent ! N’en déplaise à son président.
Conditions de test
Détails TV | 4K | Jeu fourni par l’éditeur | Oui | |
Console | Series X | Temps passé sur le jeu | 10 heures | |
Niveau de difficulté | N/A | Jeu terminé | Oui |
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