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« On souhaite que l’écosystème Xbox soit accueillant et bienveillant » : interview de Ina Gelbert, Directrice de Xbox France

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Fin Janvier, nous avons eu l’occasion d’échanger avec Ina Gelbert. L’actuelle boss de Xbox en France, bien occupée entre les nombreuses sorties à venir et l’arrivée de la prochaine console de salon de la marque, la Xbox Series X, a pris le temps de répondre à nos questions. Avec elle, nous avons pu évoquer les engagements sociétaux de Microsoft et de Xbox. De l’accessibilité du jeu vidéo à son impact écologique en passant par la place des femmes au sein de l’industrie, les sujets sont nombreux et semblent tous trouver un écho particulier chez Xbox.

Il faut dire que, depuis plusieurs années, le groupe Microsoft s’est racheté une image. Le géant de l’informatique, que tous souhaitaient fuir il y a deux décennies, fait aujourd’hui place à une entreprise dynamique et qui assume, peut-être plus que n’importe quelle autre multinationale au monde, ses responsabilités sociétales. Avec Satya Nadella à sa tête, la firme américaine se veut plus vertueuse que jamais. L’inclusion, les énergies renouvelables, la pollution, la diversité, la protection des mineurs : les domaines où la société informatique s’engage en faveur du « mieux » sont innombrables.

Le jeu vidéo ne fait évidemment pas exception et Xbox a donc aujourd’hui toute latitude pour faire changer les mentalités de l’industrie du gaming. Cette industrie où pendant des années les personnes en situation de handicap étaient laissées sur le côté, où les femmes ne peuvent évoluer librement et sereinement et où les joueurs se charrient, s’invectivent sans cesse jusqu’à parfois s’insulter, voire bien pire. Comment s’y prendre ? En traitant les sujets un à un car il y a « beaucoup beaucoup de sujets quand on cherche et il y a beaucoup de choses à faire encore » reconnait Ina Gelbert. A commencer par l’inclusion et la possibilité donnée aux joueurs en situation de handicap de s’amuser comme tout un chacun.

Développer des jeux enfin accessibles

En 2018, Microsoft surprend en effet en proposant la Manette Xbox Adaptive (XAC pour Xbox Adaptive Controller). Cet accessoire qui permet, pour un coût enfin raisonnable, de brancher tous les périphériques imaginables et de jouer sur sa console représente un immense bon en avant pour le secteur. Avec ce lancement, Microsoft « a montré à l’industrie qu’il y avait un produit facilement achetable et configurable avec une expérience de jeu beaucoup plus simple à monter et qui permettait aux joueurs de jouer comme n’importe quelle autre personne aux jeux qu’ils aiment. Cela a mis de la lumière sur ce qu’on pouvait faire chez Microsoft et permis aux joueurs en situation de handicap de se retrouver, d’en discuter sur les réseaux et donc d’adopter cette manette ».

 


« Ce que l’on essaye de faire c’est de nous mettre à la place d’utilisateurs qui rencontrent des difficultés d’usages »


 

Et en effet, depuis, l’industrie a progressé. Logitech a emboîté le pas à Microsoft en proposant des sets de boutons et gâchettes pour le XAC et Microsoft ne compte pas arrêter là ses efforts. Si Ina avoue ne « pas avoir connaissance d’autres accessoires actuellement en développement chez Microsoft », elle réaffirme néanmoins la volonté de Xbox de toujours se montrer précurseur sur le sujet. Et cela passera notamment par le développement de nouvelles aides et options dans les jeux Xbox Game Studios.

Ce sont des choses que nous avons déjà faites sur Forza ou Gears 5 qui a reçu de nombreux awards pour ses qualités d’accessibilité. On travaille par exemple sur la possibilité d’afficher les commandes de jeu à n’importe quel moment, c’est-à-dire qu’elles soient écrites à l’écran pour les personnes malentendantes notamment.  On a aussi des actions sur la luminosité, sur l’intensité du son, sur le changement de couleur. Tout cela en rendant ces options facilement paramétrables depuis les paramètres du jeu ou de la console. Ce sont des actions que l’on mène avec notre console et nos studios.

Des efforts d’accessibilité qui trouvent écho dans toutes les branches de Microsoft et qui sont impulsés par la société mère. C’est ainsi que la directrice de la division gaming en France évoque également les projets en dehors de Xbox, précisant que l’entreprise se doit tout simplement de penser aux utilisateurs, de penser aux parcours et aux solutions plutôt que simplement aux produits.

En dehors du gaming, nous avons d’autres démarches entamées sur Office 365 ou Windows pour rendre nos outils plus accessibles. On travaille par exemple la lecture à voix haute des textes affichés à l’écran ou encore la dictée vocale pour les personnes qui ont des problèmes de vues ou qui ne peuvent utiliser leurs mains pour écrire correctement. Il y a aussi d’autres accessoires développés en collaboration avec Microsoft qui permettent d’activer des fonctionnalités sous Windows en regardant certains endroits de l’écran par exemple.

Ce qu’on essaye de faire c’est finalement de nous mettre à la place d’utilisateurs qui rencontrent des difficultés d’usage.

Une démarche pragmatique et résolument responsable vis-à-vis d’utilisateurs jusqu’ici trop oubliés. Cela est-il suffisant ? Probablement pas. Tout d’abord parce que Microsoft n’est évidemment pas la seule société à produire et commercialiser des jeux vidéo et, ensuite, parce que le sujet n’est sans doute pas assez visible encore. Faut-il alors le porter jusqu’à nos politiques et faire en sorte que l’inclusion devienne une obligation ? Pas nécessairement.

« Il doit y avoir un rôle de l’État. Pas nécessairement une obligation mais il faut sensibiliser sur ce sujet, sensibiliser les éditeurs. » harangue-t-elle avant de préciser toute l’importance des députés qui sont en charge du jeu vidéo et de son développement sur le territoire : « Ces personnes doivent porter ces messages, organiser des réunions où l’on interpelle les développeurs et les éditeurs. Il faut prendre le sujet de manière plus global dans l’industrie pour faire comprendre que nous avons un vrai rôle à jouer ici.

 


« Sur le sujet du handicap, il doit y avoir un rôle de l’Etat » 


 

Un engagement qui se doit donc de dépasser le simple cadre des industriels et du milieu associatif pour se politiser. Nous avons vu en effet de nombreuses associations se former au fil des années pour permettre aux mentalités de changer, pour accentuer la prise en compte de ces sujets au plus haut niveau du pays. On pense notamment à l’action de CapGame qui, au-delà d’accompagner les studios de développement français pour faire comprendre aux équipes comment la manière de construire un jeu impacte et limite les joueurs en situation de handicap, a déjà pu présenter et défendre l’intérêt du sujet devant les élus français. Suffisant pour passer à l’action ? « Sur l’aspect handicap, Il n’y pas d’actions concrètes à ma connaissance [engagées par les politiques] » constate alors Ina. Si l’accessibilité du jeu vidéo devient visible par les consommateurs, il faudra néanmoins attendre encore pour que les élites prennent ce dossier à bras le corps.

Faire naître les carrières féminines 

En dehors du handicap et de l’accessibilité, d’autres sujets sont actuellement portés par Ina Gelbert. Première femme à la tête des services d’un constructeur en France, la question de l’intégration et de la place des femmes au sein de l’industrie est évidemment un domaine qui lui parle et lui tient à cœur. Et force est de reconnaître que le marché du jeu vidéo reste encore aujourd’hui un média très masculin malgré ses récentes évolutions.

 


« Il faut faire savoir que les métiers [du jeu vidéo] s’adressent aussi aux femmes »


 

D’un point de vue consommateur, le jeu vidéo est d’ailleurs encore aujourd’hui mal appréhendé. Alors que la parité est quasiment atteinte du côté des joueurs (en 2019, 48% du public sont des joueuses selon le SELL), l’image de ces derniers reste malgré tout celle d’« un homme plutôt geek, un peu boutonneux derrière son écran en train de jouer toute la journée ». Une mauvaise image loin de coller à la réalité mais qui s’explique notamment par des femmes qui n’ont pas suffisamment la parole. Et pour changer cela, Ina propose de s’y prendre tôt, dès les études.

Pour moi la première chose à faire c’est qu’il y ait davantage de diversité dans le jeu vidéo au niveau pro. Donc au-delà des joueuses il faut faire en sorte qu’il y ait plus de femmes chez les développeurs, les éditeurs, même chez nous, Microsoft. Et pour cela on a besoin d’initiatives pour rassurer les filles qui souhaitent se lancer dans le jeu vidéo pour leur dire qu’elles ne vont pas se retrouver qu’avec des garçons, que leurs avis vont compter, qu’elles pourront développer des jeux qui leur correspondent et dans lesquels elles se reconnaissent.

Le jeu vidéo doit faire rentrer davantage de filles dans ses cursus, les inciter à suivre la vocation qu’elles ont mais qu’elles n’assument peut-être pas en certaines occasions. Il faut aussi que les femmes soient mieux représentées au sein des entreprises et avec ça on a déjà d’énormes axes d’améliorations de l’image de la femme dans les JV. Il faut faire savoir que ces métiers s’adressent aussi aux femmes.

Des pratiques qui s’avèrent déjà être partiellement mises en œuvre chez Microsoft mais aussi grâce au travail d’associations (encore !). Ainsi, la société informatique et ses différentes divisions organisent des initiatives qui permettent à des étudiantes de venir au sein des locaux de l’entreprise pour « s’imprégner de l’univers IT, de l’univers Tech de Microsoft et de découvrir des métiers qui leur correspondent ». Mais pour les femmes déjà en poste, c’est bien par le biais de meetings et d’autres événements de réseautage que la prise de conscience de leur poids dans l’industrie se fait.

Des groupes sont actuellement très actifs comme Woman In Games qui prend beaucoup la parole. Il y a des meetings à chaque Paris Games Week qui sont organisés et on se rend compte qu’on est plus nombreuses qu’on ne le pense. On s’attend au début à être une dizaine et nous sommes en fait bien plus nombreuses, très impliquées dans l’industrie.

Un développement et des mentalités à faire évoluer loin d’être réservés, malheureusement, aux femmes. En effet, en se positionnant du côté des joueurs, une autre population est également concernée par les attaques et moqueries : la communauté LGBT+. Largement prise pour cible, le travail à réaliser est ici toutefois double, à commencer par davantage de reconnaissance. « Nous sommes dans une société où la communauté LGBT est présente mais assez peu représentée dans le jeu vidéo »

Et s’il y a clairement du mieux, difficile de lui donner tort sur ce point. Sorti des romances de Assassin’s Creed Odyssey, de Life is Strange ou encore de Overwatch, les personnages homosexuels sont rares. Bioware avait d’ailleurs proposé une approche intéressante dans Dragon Age Inquisition (un des personnages secondaires quittait le groupe si jamais votre héros était homophobe), mais les exemples sont trop peu nombreux.  « Le fait que Xbox pousse en ce sens correspond à un devoir de représenter tout le monde et faire en sorte que tout le monde puisse se retrouver dans le Jeu Vidéo. » assure alors la responsable de Xbox France en faisant référence à la fois aux actions menées lors de la PGW mais aussi au développement de fonctionnalités sur Xbox ou de jeux comme Tell Me Why qui plongera le joueur dans la peau de jumeaux dont l’un est transsexuel.

 


« Nous sommes dans une société où la communauté LGBT est présente mais assez peu représentée dans le jeu vidéo »


 

Mais ce travail de représentation ne suffira assurément pas à assainir un loisir marqué par la toxicité de certains joueurs. « D’un autre côté, il faut faire en sorte que les joueurs LGBT puissent être épargnés de toutes les remarques qu’ils peuvent recevoir de la communauté qui n’est pas toujours tendre. » précise Ina Gelbert, bien consciente que la communauté présente toujours des individus plus nuisibles que d’autres. « Il faut identifier les personnes nocives et permettre aux personnes qui le souhaitent de filtrer dans leur chat les commentaires qu’elles reçoivent. C’est notamment pour cela que nous avons différents niveaux de filtres pour faire le tri avant que les commentaires n’arrivent dans le chat. » souligne-t-elle alors avant de reprendre sur le sujet de Project Artémis et de son ambition. (Pour rappel, Projet Artémis est une intelligence artificielle visant à détecter dans les conversations de jeu les prédateurs sexuels)

L’objectif est de mettre l’IA au service de la diversité et de l’inclusion et utiliser cette technologie pour identifier en amont les personnes nocives et toxiques ou qui essayeraient d’entrer en relation avec des mineurs à travers les réseaux de chat en jeu. Ce que l’on souhaite c’est que l’écosystème Xbox soit accueillant, bienveillant et limite le plus possible les dangers auxquels les personnes peuvent être confrontées.

Un souhait que l’on espère voir se concrétiser dès la prochaine génération de console avec des outils plus développés et des fonctionnalités encore plus affinées. Découvrir chaque jour que des joueurs et joueuses ne pratiquent plus le multi, ne jouent plus au casque ou abandonnent leur titre préféré du fait de propos et comportements malveillants ne doit plus être la norme. Il est temps que des acteurs s’engagent plus massivement sur cette problématique et nous suivrons avec attention l’engagement de Xbox en la matière tout comme ceux du reste de l’industrie.

S’engager en faveur de comportements écologiques

Parallèlement aux implications de Xbox pour faire de l’industrie du jeu vidéo un média plus sain et plus inclusif, d’autres enjeux sociétaux se profilent. L’avènement annoncé de services comme xCloud et son jeu en streaming, ou l’arrivée de machines capables d’afficher de la 8K comme la Xbox Series X, posent en effet des questions sur les impacts écologiques de Xbox. La consommation des jeux numériques est de plus en plus importante (47% du chiffre d’affaire liés aux ventes de jeu se fait via le numérique selon une étude du SELL) et plusieurs études ont pu démontrer que ces produits étaient autant, si ce n’est plus, polluant que les jeux en boîtes. Et alors que l’ombre de la 5G et de débits encore plus importants se font sentir, les consciences écologiques de certains joueurs se font entendre.

« Je pense qu’on serait naïf de croire qu’on va faire sans la 8K, sans le streaming, sans la 5G » répond la directrice du gaming chez Microsoft France. « On ne peut pas tout arrêter maintenant parce qu’on se dit que le monde ne va pas très bien et que la planète n’est pas au mieux de sa forme. Ce serait utopique de penser qu’on va arrêter de consommer et qu’on va revenir en arrière » assure celle dont les convictions écologiques sont très fortes et posent question « en travaillant chez Microsoft ».

Pour Ina Gelbert les réponses sont tournées vers l’avenir et sur les moyens qui seront mis sur la table pour répondre aux enjeux qui nous attendent. « La solution est plutôt de trouver comment améliorer la vie des gens, profiter des nouvelles technologies tout en développant les moyens nécessaires pour que la pollution soit gommée. C’est changer les énergies qu’on utilise, compenser complètement ce que nous émettons » explique-t-elle en écho aux engagements pris plus tôt par Microsoft.

Car le 16 janvier dernier, la firme dirigée par Satya Nadella tenait une conférence attendue. Microsoft annonçait en effet comment elle comptait répondre aux problématiques écologiques qui se posent aux acteurs de l’informatique et du numérique en général. « Le soir de l’annonce j’étais devant mon pc et j’attendais ça impatiemment » avance alors Ina. Et elle n’était pas seule puisque les actions présentées par le géant américain ont été repris dans le monde entier.

Ce que Microsoft dit au travers de ses annonces c’est sa volonté de passer carbon negatif. On va faire en sorte d’absorber tout ce que nous produisons comme pollution en tant que société et on va aller même plus loin et on va gommer tout ce qu’on a généré comme pollution depuis la création de Microsoft.  Mais le point le plus important c’est que nous allons consacrer beaucoup d’argent à l’innovation qui va dans le sens de l’écologie. Ce sont des ambitions qui sont fortes avec des plans assez concrets de la part de Microsoft. On parle d’échéances à 2030 pour passer en carbon negatif. Dix ans c’est demain.

Est-ce que ça suffit ? Non. Mais soyons clairs, ce sont les premières ambitions. Nous ouvrons la voie et une grande société comme Microsoft qui s’engage ainsi doit en appeler d’autres à prendre le taureau par les cornes et investir dans les nouvelles technologies pour changer les modes de production qui polluent aujourd’hui. J’espère que nous serons suivis et que nos plans avanceront plus vite que ce que nous avons annoncé. Nous sommes capables de le faire et j’ai confiance en la capacité de Microsoft à aller vite.

Les intentions sont donc là. Tout au long de notre échange, l’envie d’agir, d’être acteur sur tous les sujets abordés a été palpable. Ina, et à travers elle tout Xbox France, souhaite prendre au sérieux les questions sociétales et peser dans les décisions qui seront prises au plus au niveau. Pour l’instant cela reste sous la forme de promesses d’un avenir plus positif, plus inclusif, plus vertueux. Il reviendra naturellement à la presse et aux joueurs de vérifier avec le temps si les actions sont à la hauteur. Rendez-vous est pris.

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